Asgar/ Gabriel
Utopia

Utopia
Huile sur toile, 260 x 450 cm
2009

Détail

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La peinture Utopia d’Asgar/Gabriel s’inspire d’un vide conceptuel dans le champ lexical de la langue persane selon lequel le mot « utopie » n’existe pas. Alors que le terme a été traduit dans d’autres langues, celui-ci se révèle curieusement absent du dictionnaire persan. S’intéressant à la notion d’utopie et à son utilisation langagière, les artistes ont souhaité l’intégrer à la langue persane dans une écriture farsi qui apparaît en exergue d’un tableau aux dimensions imposantes (260 x 450 cm). En référence au célèbre essai politico-social  de Thomas More (1478-1535), l’œuvre s’inspire de la genèse d’une île mystérieuse nommée Utopia. Lieu qui ne se trouve nulle part, mais également lieu de bonheur selon sa double racine grecque , l’île apparaît comme un territoire fictif dont le modèle idéalisé devient objet d’un récit fantastique.

Entre scène dionysiaque et scénario post-apocalyptique, Utopia manifeste l’expression d’une génération sans abri idéologique en quête d’un nouvel héroïsme. Alors que les visions communautaires des années 60-70 sont désormais archivées, l’œuvre revisite les vestiges d’une culture hippie récupérée par une jeunesse hédoniste. Du thème mythologique à la bacchanale, le tableau met en scène de jeunes éphèbes dénudés qui figurent comme motif ornemental selon un jeu de cadres délimitant la toile. Tandis que l’on retrouve par ailleurs l’allusion aux mystères de Bacchus, l’œuvre met en scène des personnages choisis dans une représentation théâtralisée, construite à partir de clichés trouvés ou de photographies personnelles. De l’exaltation de vacances au bord de l’eau à l’exploration d’un nouveau monde jusqu’à la survie de rescapés sur une île déserte, Utopia se conçoit dans l’énoncé d’une narration fictionnelle. Huile sur toile grand format, la peinture réalisée au pinceau et au doigt croise les courants de l’histoire de l’art, du baroque au romantisme en passant par le pop-art. Derrière la figuration mythologique d’un Rubens ou d’un Tiepolo, on croit percevoir la tragédie évoquée dans le célèbre tableau de Géricault , tandis que l’utilisation de couleurs flashy offre la vision édulcorée d’une génération à la recherche d’un idéal commun.

Vérane Pina

[1] Utopia (Libellus vere aureus nec minus salutaris quam festivo de optimo statu rei publicae deque nova insula Utopia) paru en 1516
[2]  « Utopie » est un néologisme formé par Thomas More à partir de la double racine grecque u-topos signifiant littéralement le « non-lieu », le « non-localisé », voire l’« illocalisable » et eu-topos signifiant « lieu de bonheur »
[3] Le Radeau de la Méduse (1819)

La peinture Utopia d’Asgar/Gabriel s’inspire d’un vide conceptuel dans le champ lexical de la langue persane selon lequel le mot « utopie » n’existe pas.