Taysir Batniji
Hannoun

Hannoun
Performance/Installation, photographie couleur (jet d'encre) sur papier affiche (150 x 100 cm), copeaux de crayons, dimensions variables 
1972-2009

Atelier
Photographie jet d'encre sur papier affiche, 150 x 100 cm
2006-09

Hannoun
Détail, copeaux de crayons
1972-2009

Hannoun
Détail, copeaux de crayons
1972-2009

 

Oeuvre conçue pour le premier pavillon Palestinien de la  Biennale de Venise, en juin 2009.

Le projet Hannoun (coquelicot en dialecte palestinien) consiste à parsemer un sol d'une couche de copeaux de crayons (à papier) rouges taillés. Faire ainsi de cet espace un champ dont les « fleurs » formées par les copeaux suggéreraient celle du coquelicot ; un paysage impalpable que l'on observe, comme dans un songe, à partir d’un seuil infranchissable.



Cette pièce s'inscrit dans la lignée de plusieurs travaux à caractère performatif réalisés ces dernières années et évoquant les notions de mémoire, d'effacement, de non-état, de destruction / construction (ou déconstruction / restitution). Chacune de ces « formes actées » est la résultante d'un geste obsessionnel, répétitif, souvent inutile ou absurde.

Outre l'incontournable symbolique incarnée par le coquelicot – généralement associé, dans les consciences ou la littérature palestinienne, au souvenir des combattants morts pour la liberté –, ce travail est issu d'un souvenir d'enfance. L'apprentissage à l'école voulait que chaque enfant recopie x fois ses leçons au crayon, à la main, et particulièrement pendant les périodes de vacances. Voulant inconsciemment y échapper, je passais mon temps à tailler mes crayons, sous le prétexte qu'ils soient bien aiguisés, finissant ainsi toujours par manquer à mon devoir.



Avant tout, Hannoun a été pensé, au-delà de toute notion politique ou géographique, comme un espace idéel, un espace de méditation, de rêve, une sphère de l’intime, légère, fragile et imposante à la fois... une terre impénétrable... inaccessible… à l’image de mon Atelier (22.06.2006-07.06.2009) à Gaza. À peine sa construction achevée en 2001, j'ai dû retourner en Europe. Depuis, je vis principalement à Paris. Chaque année, lorsque je rentre chez moi (ce qui ne m'est plus possible depuis la fermeture des frontières par les Israéliens en juin 2006), j'ouvre mon atelier – laissé à l'abandon –, passe en revue mes affaires et chasse la poussière qui en recouvre le sol. Mais il est déjà temps de repartir et je le referme. À Gaza : un lieu de production réel mais inaccessible, à Paris ou ailleurs : une production réelle sans lieu physique de réalisation. À l'image de l'atelier – lieu d'élaboration, de chantier, de travail – Hannoun est une « tentative d'œuvre » dont on ne perçoit pas tant le produit fini que les traces de sa possible réalisation.


Taysir Batniji
Texte co-écrit avec Sophie Jaulmes

Hannoun a été pensé, au-delà de toute notion politique ou géographique, comme un espace idéel, un espace de méditation, de rêve, une sphère de l’intime, légère, fragile et imposante à la fois... une terre impénétrable... inaccessible… à l’image de mon "Atelier" à Gaza.