Kader Attia
Big Bang

Big Bang

Sphère en polyuréthane motorisée, miroirs, diamètre 1m80, 2005.

Big Bang

Sphère en polyuréthane motorisée, miroirs, diamètre 1m80, 2005.

 

Au delà des théories scientifiques, la question de l’origine de l’univers demeure un sujet de fascination et un abîme philosophique. On nomme Big Bang, en l’état actuel des possibilités conceptuelles humaines, le point d’origine du temps, de l’espace et de la matière. Kader Attia propose une représentation imagée pleine de poésie de ce modèle cosmologique. Il utilise un vocabulaire plastique faussement naïf et enfantin pour élaborer un dispositif à double sens : au premier coup d’œil, on tombe sous le charme d’une sculpture monumentale fonctionnant comme une gigantesque boule à facette. Dans la pénombre, le dispositif animé d’un mouvement rotatif sature le lieu d’exposition de centaines d’éclats lumineux qui projettent le spectateur dans un espace perceptif inhabituel, hypnotique, planant.

Mais, loin de la légèreté et du décoratif, une sensation physique de tension se dégage de l’installation, peut être due à l’imposante taille de ce globe suspendu par une lourde chaîne. De plus, les étoiles et les croissants de cet univers, habituellement utilisés sur les drapeaux nationaux des communautés arabo-musulmanes et juives, font basculer l’évocation du cosmique à une dimension historique. Chargé de symboles à la fois politiques, culturels et religieux, ce Big Bang fait écho à des conflits contemporains. Présentée pour la première fois au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme à Paris, cette œuvre est symptomatique de la volonté de l’artiste d’ouvrir par la représentation une réflexion directe sur le monde qui nous entoure, de pointer des zones de frictions.

Dans la lignée d’artistes tels que Mona Hatoum ou Alighiero Boetti, Kader Attia joue avec des signes d’appartenance et d’identité culturelle, avec des codes communautaires institués, tout en transformant radicalement leur contexte d’interprétation. Confrontée à une dimension sidérale, toute différence géopolitique devient alors salutairement dérisoire. L’artiste semble ainsi nous inviter à considérer avec sagesse un fondement commun.

Marion Guilmot

Confrontée à une dimension sidérale, toute différence géopolitique devient alors salutairement dérisoire.