Des guirlandes lumineuses et autres guirlandes de fleurs, des mannequins en plastique, des poupées Barbie, des figurines de jeunes mariés pour pièce montée, encore des fleurs en plastique, des tanks et des kalachnikovs, du tulle, du taffetas, de la dentelle, du rose, du rose, toujours du rose… Le paradis de Zena el Khalil est un paradis confiné dont la surabondance d’une décoration mêlant l’édulcoré au barbare peut donner une sensation oppressante au visiteur.
De cette composition pastiche reliant, entre chimère et cauchemar, les rêves d’une jeune femme tour à tour princesse des Milles et une Nuits, reine de la pop ou du hip hop, femme mariée, voilée ou playmate dénudée, Zena el Khalil nous plonge dans une intimité paradoxale qui, au-delà de la conscience individuelle, renvoie à la mémoire collective d’une ville en guerre.
L’installation réalisée à la suite des événements de juillet 2006 à Beyrouth témoigne de l’expérience de l’artiste durant l’occupation. Dans un paysage intérieur ou paysage mental avec pour seule ouverture sur le monde la vision surannée d’une plage de cocotiers, une mer de taffetas rose vient border des stèles proprement décorées sur lesquelles reposent naïvement les figures d’enfants bandés ou de maris décapités. Soulevant la question de la représentation de la femme quant à ses attendus dans une société au devenir incertain, l’artiste se joue des clichés pour recréer un univers acidulé dont seule l’horreur kitsch pourrait peut-être faire oublier celle de la guerre.
Vérane Pina
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